Savez-vous d’où vient la plainte la plus fréquente ? Non point du patient mais de la Sécurité sociale. « Le contrôle d’activité peut vous tomber dessus très facilement, il suffit de mal coter un acte et le dentiste conseil va voir apparaître des alertes sur son logiciel, explique Jean-Claude Lucet, vice-président du syndicat Le chirurgien-dentiste de France (CDF) du Loir-et-Cher. Il y a des règles à respecter liées à la convention, sans quoi on vous réclamera des indus. Ce peut être pour une technique jugée obsolète ou un trop grand nombre de radiographies facturées à un même patient. Autre exemple, un détartrage se fait tous les six mois, et un détartrage complet se fait en deux fois maximum, le premier acte sur des dents du haut est facturé 28,92 € et le deuxième...

sur les dents du bas 14,48 €. À un moment donné nos logiciels de facturation étaient mal paramétrés… ce qui a pu poser problème à certains confrères. »

« Sur l’année 2018, on m’a fait part de quatre contrôles d’activité sur le département, témoigne Jean Desmaison, président du CDF des Deux-Sèvres. Le professionnel contrôlé doit absolument se faire aider car il peut se retrouver à fournir l’ensemble des radiographies pratiquées, devoir justifier de centaines d’actes et être convoqué à un entretien. »

La procédure débute par un courrier de la Sécurité sociale avec la liste des dossiers patients qu’elle envisage d’examiner. « Pour ma part, j’ai eu un contrôle en rapport avec deux patientes, témoigne Jean-Claude Lucet. Par exemple, on m’a reproché d’avoir traité deux caries sur une même dent la même année, j’ai dû prouver qu’il s’agissait d’une femme dont la ménopause précoce avait provoqué des caries avec déchaussement des dents. Il est important de fournir les éléments demandés puis de répondre point par point aux griefs. »

L’organisme de Sécurité sociale peut renoncer à poursuivre le chirurgien-dentiste, mais il peut aussi demander à recouvrer un indu, appliquer des pénalités financières voire, ce qui est exceptionnel, dans le cas de fraudes, abus, mettre en œuvre des procédures disciplinaires devant le conseil de l’Ordre, des procédures conventionnelles ou des actions devant les juridictions pénales.

Le risque des sanctions disciplinaires ordinales
Si les contrôles d’activité restent les plus fréquents, les plaintes des patients augmentent également. 7 chirurgiens-dentistes sur 100 en seraient victimes (voir interview p.74). Les litiges peuvent se régler à l’amiable ou bien prendre différentes voies : ordinale, civile ou pénale. Les différentes formes de ces plaintes rendent complexes leurs résolutions et sont souvent responsables de nuits blanches pour les praticiens… Et pour cause, une plainte déposée devant le conseil de l’Ordre pourra déboucher sur une sanction disciplinaire, de l’avertissement à la radiation. En pratique, le patient doit saisir le conseil de l’ordre départemental qui doit organiser une conciliation. Si celle-ci n’aboutit pas, la plainte est transmise au niveau régional à la chambre disciplinaire de première instance dont la décision peut faire appel et saisir la section disciplinaire du conseil de l’Ordre national. La décision de cette dernière peut faire l’objet d’un pourvoi en cassation devant le conseil d’Etat

Indemnisation avec la procédure civile
Pour obtenir une indemnisation, en cas de différend, le patient opte généralement pour la conciliation amiable, en envoyant une lettre à son praticien qui saisira son assurance responsabilité professionnelle. Une expertise pourra être réalisée afin de déterminer les manquements s’il y a lieu. Si aucun accord n’est trouvé, il peut alors saisir le tribunal d’instance (pour un montant inférieur à 10 000 €) ou le tribunal de grande instance (pour un montant supérieur à 10 000 €). La procédure s’avère longue, coûteuse, éprouvante pour les deux parties, et incertaine en termes de résultats.

Quand le patient engage – cela reste rare – une procédure pénale, il a un tout autre objectif : il entend faire condamner le praticien. « Les patients sont alors vindicatifs, constate un avocat spécialisé en droit médical et dentaire. Ils intentent un procès soit en raison d’un problème de mœurs soit en raison d’un manque de considération. » Cet avocat suit actuellement une affaire où un patient a porté plainte au pénal pour discrimination, injure et menace. « Il s’agit d’un homme bénéficiant de la CMU, qui, en raison d’un déchaussement doit avoir un implant, raconte-t-il. Pour obtenir une prise en charge dérogatoire de la part de la Sécurité sociale, il a demandé au praticien un courrier, puis a demandé que ce courrier soit refait plusieurs fois. Il est venu faire un esclandre dans la salle d’attente et le chirurgien-dentiste l’a obligé à sortir du cabinet, ce qui l’a rendu furieux. »

Tous les praticiens peuvent être un jour concernés par une réclamation… « d’autant que les patients deviennent consuméristes, ils veulent du résultat », estime l’avocat. Pour faire face, il faut adopter une véritable stratégie de défense.

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